Identifier et prévenir le harcèlement scolaire

Pourquoi y-a-t-il du harcèlement scolaire ? Pourquoi dans ce lieu qui devrait être protégé, surveillé, propice aux études? Faut il y voir une malédiction qui fait se reproduire la violence partout où il y aurait des êtres humains ? Faut-il se résigner ? Se dire que ça a toujours existé, voire, comme le prétendent certains adultes, parents, professeurs, que « ça forge le caractère » ?  Non, merci ! Un enfant en souffrance est un enfant dont les facultés d’apprentissage sont bloquées, dont la personnalité est volée, et qui, un jour ou l’autre, sera malade de cette violence qui lui est faite. Le 5 novembre 2015 le numéro vert « Non au harcèlement » (3020) a été ouvert. La plate-forme téléphonique a explosé et beaucoup d’appels étaient passés par des enfants.

Aujourd’hui, la perception de la violence au niveau scolaire a changé. On sait qu’il s’agit d’un phénomène de groupe, d’autant plus complexe à comprendre qu’il met en jeu des « rôles », que les enfants tiennent sans parfois en avoir parfaitement conscience.

Tel enfant agresseur, sera dans la famille, gentil et plutôt introverti ; et le harcelé peut être un enfant gai et enjoué, plein de créativité.

Le harcèlement peut être défini comme un dysfonctionnement dans la mise en place de la relation à autrui.

L’école est le lieu des apprentissages sociaux. C’est là que l’on apprend des choses aussi immatérielles qu’essentielles : se comporter en groupe, collaborer, travailler, jouer ensemble, manger ensemble, gérer les différences. Les adultes ont là à jouer leur rôle d’enseignants, accompagnants ET éducateurs.

Il existe plusieurs types de harcèlement : un petit garçon sera victime de moqueries, brimades ou menaces (harcèlement moral) ; parfois, les choses vont plus loin : coups, violences physiques ; d’autres enfants seront aussi victime de rackett, ou encore de harcèlement sexuel : toucher, déshabiller, embrasser de force un autre enfant.

Plus récemment, s’est mis en place une forme de harcèlement qui, s’il nait à l’école dans le « groupe de pairs », se poursuit à la maison, par le biais des réseaux sociaux, qui favorisent la propagation de rumeurs, photos, videos malveillantes. On l’appelle le cyber harcèlement.

En tout état de cause, le harcèlement est une violence répétée, qui implique l’humiliation ou la dégradation de la victime.

Il est notable que ce phénomène est surtout identifié à l’école élémentaire et au collège.

Les chiffres effarants du harcèlement scolaire

harcèlement scolaire
Affiche primée 2018 collège Jean Moulin de Sannois

 Voici quelques chiffres : 700 900 élèves français sont victimes de harcèlement. 12 % des écoliers et 10% des élèves de collèges se déclarent victimes régulières de harcèlement tandis que 7 % reconnaissent être des auteurs de harcèlement. A partir du lycée, les chiffres chutent : il y a 3,4 % des lycéens « seulement » qui souffrent de harcèlement (chiffres DEPP, 2011, 2013)

L’école n’a pas à être un lieu de violence. Et pourtant, on constate que les comportements des enfants en groupe sont parfois comparables au fonctionnement des meutes animales : la dominance d’un mâle ou d’une femelle alpha qui se fonde sur la soumission des autres. Pour asseoir sa domination, il doit attaquer celui ou celle qui apparaît comme different, rival potentiel ou « faible » (plus jeune, plus timide, …)

La personne harcelée, bien souvent  se transforme en bouc émissaire : le groupe va se constituer, se définir et se souder contre une victime qui sera identifiée comme « l’ennemi », different et  qui, souvent, sera le paratonnerre de la violence du groupe. Le « Tous contre tous » devient le « tous contre un ».

 

Le harcèlement scolaire est un scénario qui se joue à trois :

Le harcelé : il présente des différences qui vont le faire remarquer par le groupe : c’est le nouveau, c’est un enfant timide ou plus calme ou plus jeune ; il a une couleur de peau, de cheveux, différents, il recherche l’intégration dans le groupe. Il est souvent bien élevé.

Le harceleur : C’est un enfant plus âgé, fort, agressif, il se pose comme un chef. Il est souvent drôle et rusé  (le rire est souvent central dans le harcèlement : « c’est pour de rire ! »); il manque la plupart du temps d’empathie et donc ne se sent pas coupable.

Le groupe : Il est constitués d’enfants qui vont être spectateurs souvent complices, encourageant le harcèlement pour les uns, et dans la majorité des cas, restant passifs et silencieux.

 

Agir en préventif contre le harcèlement scolaire!

Que faire, y-a-t-il des actions à mener pour que le harcèlement ne se produise pas?

C’est, avant toute chose, à l’école de mettre en place des actions de prévention : libération de la parole, travail sur les règles de vivre ensemble, tout un ensemble d’outils pédagogiques ont été proposés au écoles.

Du côté des parents, pouvoir détecter le harcèlement passe par de l’attention et de l’observation vis-à-vis de l’enfant : a-t-il changé? Est-il préoccupé, triste? Ses notes ont-elles chuté?Dort-il mal? dans tous ces cas, il est important de s’en inquiéter auprès de l’enseignant. Car, souvent la honte liée au harcèlement va interdire à l’enfant de se confier au parent, il veut « s’en sortir tout seul ».

Réagir sans attendre !

Le site du gouvernement a mis en place un numéro vert qui peut vous apporter des conseils supplémentaires ainsi qu’un site: 

 http://www.nonauharcelement.education.gouv.fr

En ce qui concerne le harceleur, il est important que l’enfant concerné puisse comprendre que « ce qu’il a fait est mal », qu’il lui soit clairement signifié que ses actes sont de sa faute, et qu’il soit puni.

En ce qui concerne l’enfant harcelé, il est vital de pouvoir rétablir la justice : souvent il lui est infligé la double peine d’être humilié ET grondé s’il entreprend quoi que ce soit pour se défendre. Apprendre à se défendre et à s’affirmer est une démarche libératrice et thérapeutique pour l’enfant.

Laisser passer les moqueries et les agressions aggrave les choses et enferme l’enfant dans le rôle de la victime.

Il faut aider l’enfant à parler et l’autoriser à être en colère. L’éducation familiale a plutôt tendance à encourager l’enfant à contrôler et inhiber ses émotions ; du coup, il n’ose pas ressentir la violence de la colère.

Vous pouvez expliquer à un enfant comment vous réagiriez à se place, et lui rappeler qu’il y a toujours autour de lui, à l’école ou ailleurs, des adultes qui vont l’écouter et l’aider.

Vous avez à le rassurer sur sa capacité à dire NON quand il ne veut plus qu’on l’accuse, qu’on l’insulte ou qu’on le malmène.

Bien sûr, dans un monde idéal, l’adulte tout puissant devrait savoir détecter les violences et apaiser le jeu. Mais dans le réel, il n’intervient souvent que lorsque le mal est fait. Il est plus facile de démêler les choses à plusieurs, entre parents-enseignants.
Au-delà, un vrai travail thérapeutique peut-être mené pour restaurer l’estime de soi de l’enfant : à travers des activités qui le valorisent, sport, art, théâtre…et aussi par des discussions avec un adulte de confiance ou quelques séances chez un thérapeute.

Etre parent d’un enfant harcelé, ce n’est pas facile. Mais vous pouvez toujours vous faire épauler par un membre du personnel de l’école ou, le cas échéant, par un psy, s’il a la confiance de l’enfant.

En ce qui concerne le groupe impliqué dans le harcèlement, un travail doit être fait. C’est le silence ou la complicité du groupe qui rend possible le harcèlement scolaire.

Sortir de la situation requiert de l’écoute, du temps, du soin. Un professeur de psychologie, Anatole Pikas a mis au point la méthode des intérêts communs : au cours d’entretiens avec les élèves impliqués, on revient sur les faits pour les reconnaître, lancer des actions et sortir l’enfant de son statut de victime. Cette approche prend en compte la dimension de groupe, en invitant les enfants à briser le silence.
Lutter contre le harcèlement quelle que soit sa forme, c’est éduquer les futurs citoyens à vivre la différence dans le respect et la collaboration. C’est dire les enjeux aussi bien individuels que sociaux. Le harcèlement scolaire fait d’ailleurs l’objet d’un plan de prévention national.